Annie Ernaux a été nommée Prix Nobel de littérature et rien ne pouvait nous faire plus plaisir. Rares sont celles et ceux parmi nous, au sein de l’organisation du Prix littéraire des Étudiants de Sciences Po, à ne pas faire figurer Annie Ernaux dans les incontournables de nos bibliothèques personnelles. Chacun et chacune d’entre nous avons été tour à tour bouleversés, en colère, heureux, nostalgiques à la lecture des différents textes, devenus classiques, de cette autrice iconique.

Qu’elle raconte l’amour, le transfuge de classe, mai 68, la filiation ou encore les drames que sont l’avortement ou une agression sexuelle, Annie Ernaux nous accompagne dans toutes les étapes de nos vies. En nous racontant la sienne, elle décrit la société dans laquelle on vit mais aussi la société qu’on ne saurait voir : les classes populaires, le monde de l’enseignement, la condition des femmes.

Mais Annie Ernaux n’est pas seulement une écrivaine remarquable, un riche monument de la littérature française, elle est aussi une femme engagée qui ne craint pas de prendre position en faveur des luttes qui lui tiennent à cœur. Elle est un exemple d’engagement littéraire et politique, une valeur que nous chérissons particulièrement dans l’équipe.

Nous souhaitons ici lui rendre hommage, exprimer ce qu’elle représente pour chacun et chacune d’entre nous et donner envie, à celles et ceux qui n’en auraient pas encore eu l’occasion, de lire ou de relire Annie Ernaux.

« Je me souviendrai toujours de mon premier Annie Ernaux. J’avais décidé, après une rupture amoureuse de me plonger dans la lecture d’une histoire d’amour faite de passion, d’interdits, de bonheur et de douleur. Quelle idée de commencer le long chemin tracé par les livres d’Annie Ernaux par Passion simple. J’en sorti bouleversée et avide de découvrir cette autrice dont j’avais tant entendu parler. Je me transformai en mangeuse de ses écrits, je dévorais ses histoires de femmes et d’amour, ses mots sur ses parents, ses analyses de la société et de sa « race ». Je découvrais son style, ses phrases courtes, son rythme. Enfin, je découvrais la femme, l’autrice engagée, ses interviews passionnées et passionnantes. Bref, quand on commence à lire Annie Ernaux, c’est difficile de s’arrêter, on devient addicts, insatiables. On ne peut que l’aimer. »

Victoria 

« Annie Ernaux, c’est le Harry Potter de mes 17 ans, j’aimerais pouvoir me réveiller un matin, n’avoir jamais lu L’évènement, et revivre le choc de mon entrée dans cette écriture qui m’a attrapée par les boyaux et ne m’a plus jamais lâchée. L’œuvre d’Annie Ernaux est riche, mais je reste prudente, je me rationne, j’espère tenir jusqu’à mes 30 ans avant d’être à sec, et puis je recommencerai. »

Emma

« La première fois que j’ai écrit, c’était un texte basé sur Passion simple, de Annie Ernaux, pour un cours à la fac. « À partir du mois de septembre l’année dernière, je n’ai plus rien fait d’autre qu’attendre un homme ». C’est en recopiant cette petite phrase pour démarrer mon récit, que je me suis sentie, pour la première fois, légitime d’écrire. Pour moi c’est ça aussi l’engagement, donner aux gens l’envie de raconter leurs histoires et les partager. C’est la vérité à l’œuvre.« 

Laura

À travers La Place et Une femme qui doivent, il me semble, se lire ensemble, Annie Ernaux se situe « en-dessous de la littérature », à la jointure de l’Histoire, du mythe, et du social.
La simplicité de son écriture lui permet de dire la vérité, la brutalité du quotidien. Récit d’une époque, l’œuvre d’Annie Ernaux touche pour autant au-delà. C’est avant tout celui de l’ascension sociale et de la déconnexion entre classes sociales au sein d’une même famille. Celui de la dureté des vies individuelles affectées par le fait politique qui domine L’évènement, où la confrontation à la violence de l’avortement nous oblige. Au-delà de récompenser une femme qui n’en était pas prédestinée, c’est offrir sa juste place à l’autofiction et affirmer la place du récit social dans un la littérature.

Titouan

« Annie Ernaux, dont le nom sonne si doucement, est pour moi un cri.  Un assommant cri d’espoir, d’autant plus assourdissant qu’il est celui de ceux dont on ne connaît que le silence. J’ai toujours cherché, dans les pages de mes livres, à découvrir une autre réalité à partir des mots. Les livres d’ Ernaux ont réussi le tour prodigieux de faire l’inverse : me donner à voir des mots, construits sur ce que je ressens comme ma propre réalité. Je n’ai que 20 ans, mais Annie Ernaux m’a déjà  appris à dire oui au monde, à vivre sans avoir honte, et à écrire comme si l’on pouvait y laisser sa peau. Parce que « Si on ne pense pas qu’on peut mourir après, ça ne vaut pas le coup d’écrire ». Merci à elle. »

Cloé